Dans le Pays basque en 2016, les agences d’urbanisme avaient publié leur "manifeste de Bayonne", à travers lequel elles entendaient se positionner dans le nouveau contexte territorial national, marqué par la réorganisation des collectivités locales (cf. UI n°1992). A Strasbourg la semaine dernière (8 au 10 novembre), c’est une réflexion plus large qui a été proposée aux agences pour leur 38e rencontre, sous le thème "Construire l’Europe des lieux et des liens". "L’organisation du territoire n’est pas à l’échelle où elle devrait être", justifie ainsi Robert Herrmann, président (PS) de l’Eurométropole de Strasbourg. Et le président de l’Adeus (agence de développement et d’urbanisme de l’agglomération strasbourgeoise) d’évoquer l’exemple du plan de prévention des risques inondation de la capitale régionale, qui "s’arrête au bord du Rhin". Et si dans ces zones transfrontalières, la dimension européenne est malgré tout plus présente qu’ailleurs, les différents intervenants ont rappelé tout au long des trois jours l’importance des politiques de l’Union au niveau local. "Certains programmes européens sont fondamentaux pour le développement de nos territoires", souligne Laure-Agnès Caradec, présidente de l’Agam (agence d’urbanisme de l’agglomération marseillaise). Encore faut-il y faire appel. "On se saisit trop peu de la question européenne dans les collectivités", voire au niveau national, estime Brigitte Bariol-Mathais, déléguée générale de la Fnau, recommandant de "faire de la pédagogie" pour "expliquer les mécanismes qui peuvent être complexes et les alliances qu’il faut faire". Pour Jean Rottner, président de la Fnau, "les pouvoirs locaux doivent prendre leurs responsabilités pour construire l’UE de demain". "Il ne faut plus se dire 'il y a mon territoire et l’Europe’, mais [se demander] 'comment, dans mon territoire, je participe à la construction de l’Europe’", souligne-t-il.
Intégrer les conventions démocratiques
Alors que les discussions sur l’avenir de la politique de cohésion européenne après 2020 sont en cours, les agences entendent prendre leur place dans ce débat. Elles ont "un véritable rôle à jouer pour dire quelles sont les priorités", estime Anne Sander, députée européenne. Car si, comme l’affirme le directeur des stratégies territoriales du CGET, Hugo Bevort, "la politique de cohésion survivra après 2020", ce sera dans un "contexte budgétaire extrêmement contraint", notamment en raison du Brexit. Cette politique est "celle à travers laquelle les citoyens vivent l’Europe. Elle ne doit pas servir de variable d’ajustement, alors même qu’elle devrait être présentée comme la principale politique d’investissement", plaide pour sa part Frédéric Vallier, délégué général du Conseil des communes et régions d’Europe.
Dans ce contexte, les agences d’urbanisme ont demandé, par la voix de leur président, Jean Rottner, à avoir une place dans les "conventions démocratiques" qu’Emmanuel Macron souhaite voir mises en œuvre. Autre proposition issue des débats, le développement d’un "Erasmus des territoires". Sur le modèle des échanges universitaires, il permettrait aux élus de s’immerger dans d’autres cultures et manières de faire la ville, et de s’inspirer des bonnes pratiques. La Fnau, qui entend par ailleurs "développer des liens plus étroits avec Urbact ou le Conseil des communes et régions d’Europe", va mettre en débat au sein de son bureau l’ensemble des pistes mentionnées lors de la rencontre, avant de les diffuser plus largement. (EB)